La Russie intensifie ses efforts pour consolider son contrôle sur l’industrie vitale des céréales, ce qui pourrait lui conférer une influence accrue sur les exportations, alors que les inquiétudes concernant l’approvisionnement mondial se multiplient, selon un rapport de Bloomberg publié ce dimanche.
L’année dernière, les principaux acteurs occidentaux, dont Cargill et Viterra, ont quitté la Russie sous la pression du gouvernement, laissant ainsi le champ libre aux entreprises locales.
Aujourd’hui, même la plus grande entreprise céréalière du pays rencontre des difficultés à opérer en raison de différends avec l’État, réduisant le marché à un nombre restreint d’entreprises, dont certaines ont ou ont eu des liens avec le Kremlin.
Ce processus de consolidation a débuté après le déclenchement de la guerre russo-ukrainienne, ne laissant que quatre entreprises responsables des trois quarts des exportations de céréales depuis les ports de la mer Noire en Russie.
Selon Bloomberg, cette situation confère à la Russie un pouvoir accru sur les approvisionnements en blé, essentiels pour maîtriser l’inflation des prix alimentaires mondiaux, tout en rendant plus difficile pour les négociants étrangers de suivre les flux de céréales. Cette situation est aggravée par les mauvaises conditions météorologiques qui affectent les récoltes de blé en Russie, suscitant des inquiétudes sur le marché.
L’agence économique a cité le président de la société de conseil AgResource, basée à Chicago, affirmant que la Russie a des ambitions réelles de contrôler les matières premières, et son influence sur le marché des céréales est en augmentation.
L’industrie du gaz naturel en Russie a toujours été sous contrôle gouvernemental, tandis que l’État et les alliés proches de Poutine ont réussi à prendre le contrôle d’une grande partie de la production pétrolière depuis son arrivée au pouvoir. Désormais, le pays exerce également une emprise sur les céréales.
L’année dernière, Cargill, Viterra et Louis Dreyfus ont cessé d’approvisionner la Russie en céréales pour l’exportation, alors qu’ils figuraient auparavant parmi les dix plus grands exportateurs.
Cependant, le différend avec l’entreprise TD Rif met en lumière la pression exercée par le gouvernement sur les exportateurs privés russes. Cette société, récemment rebaptisée Rodi Polia, a aidé Moscou à s’établir comme une puissance agricole, mais elle fait maintenant face à des menaces pour ses activités.
Peter Khodykin, propriétaire de longue date, a déclaré en mars sur le site Lenta.ru que les expéditions de son entreprise avaient été injustement bloquées par l’autorité réglementaire agricole pour non-conformité aux exigences de sécurité, et qu’il avait été contraint de vendre l’entreprise.
Plusieurs personnes habituées à acheter auprès des partenaires exportateurs de l’entreprise ont déclaré qu’elles n’étaient plus actives sur le marché depuis mars, et que les expéditions de l’entreprise avaient chuté d’environ 40 % en avril par rapport à l’année précédente, selon les données de Logistic OS. Il faut généralement entre deux semaines et quelques mois après la signature d’un accord pour charger les céréales sur les navires.
Depuis le début de la guerre en Ukraine, Moscou cible de plus en plus les actifs détenus par des oligarques locaux et certaines unités de sociétés étrangères, allant des producteurs de pâtes à la filiale russe de la société française Danone, soit pour les nationaliser, soit pour les vendre à des entreprises privilégiées par le Kremlin. Elle a également pris le contrôle d’actifs d’une société holding agricole, visant les pays qualifiés de “non amicaux” selon la terminologie officielle russe.
Source : Al Jazeera Net