Les petites et moyennes entreprises (PME) en Tunisie font face à une crise étouffante, notamment en ce qui concerne l’obtention des financements nécessaires pour maintenir leur continuité d’une part, et la création d’emplois d’autre part.
Après la pandémie de coronavirus, la crise de ces entreprises s’est aggravée davantage en raison de leur suspension prolongée de travail et de production, ainsi que de la pénurie de matières premières sur le marché mondial et de leur coût élevé en raison des conflits et des guerres qui se produisent dans le monde actuellement.
La colonne vertébrale de l’économie nationale
Les petites et moyennes entreprises jouent un rôle crucial dans l’économie tunisienne, représentant environ 80 % du tissu économique.
Cependant, les PME souffrent aujourd’hui des obstacles imposés par les institutions financières aux entreprises en difficulté pour les aider à rétablir leur santé financière et à revenir au cycle économique avec le moins de pertes possible.
Les données varient concernant le nombre de petites et moyennes entreprises et leur définition. En fait, les organisations professionnelles estiment qu’il y a plus de 700 000 entreprises, tandis que les données officielles du registre national des entreprises indiquent qu’elles ne dépassent pas 40 000.
Dans ce contexte une étude réalisée par l’Institut national de la statistique et la Société financière internationale ( l’organe du Groupe de la Banque mondiale chargé des opérations avec le secteur privé), sur la situation des entreprises économiques en Tunisie en juillet 2020, a révélé que 11,1 % des entreprises actives dans le secteur de l’hébergement, de la restauration et des cafés ont fermé définitivement leurs portes.
La même étude a montré que 6,3 % des entreprises qui ont été fermées définitivement sont celles dans le secteur des industries chimiques et pharmaceutiques, tandis que 6,9 % des petites entreprises ont fermé définitivement.
L’étude, qui a porté sur 2 500 entreprises économiques, a également indiqué que les services d’hébergement, de restauration et de cafés sont les secteurs ayant effectué le plus d’ajustements en matière d’emploi.
Et d’ajouter que 30,5 % des entreprises opérant dans les secteurs susmentionnés ont effectué des licenciements.
La même source a souligné que les mesures de confinement ont entraîné la perte de 161 000 emplois et la faillite de plus de 1 000 entreprises.
200 000 entreprises sont en état de faillite ou de coma économique
Le président de l’Association Nationale des Petites et Moyennes Entreprises (ANPME) Abdelrazek Houas a déclaré dans une déclaration à “TuniBusiness”, ce vendredi 3 mai 2024, que ces entreprises font face à des conditions très difficiles en raison de plusieurs facteurs, précisant que le marché tunisien a été affecté par les produits importés et la pandémie de coronavirus.
En effet, depuis 2023 les impacts de la pandémie ont commencé à se manifester avec le manque de décisions nécessaires pour sauver ces entreprises. À cet égard, Houas a ajouté que les PME ne bénéficient pas de financements offerts par certaines entités étrangères et qui sont attribués à d’autres entreprises qui n’en ont pas besoin.
Il a affirmé qu’il y a 200 000 entreprises en situation de faillite selon les statistiques de l’association, notant qu’elle concernent les entreprises qui sont en état de coma économique et incapables ni de se charger des salaires, et ni de produire.
Un programme de sauvetage est nécessaire
Le porte parole de L’ANPME a appelé à mettre en place un programme de sauvetage pour les petites et moyennes entreprises sous la supervision du ministère de l’Économie et de la Planification, à fournir les financements nécessaires et à ne pas les faire passer par les banques, mais à les diriger vers les entreprises éligibles.
Il a également souligné la nécessité de séparer complètement les entreprises en faillite de celles qui peuvent être sauvées, et a insisté sur la nécessité d’adopter des textes législatifs pour fournir une protection légale à ces entreprises, afin de sauver les secteurs qui peuvent être restructurés et développés.
Il a signalé que l’importation des produits étrangers et l’ouverture des portes à la contrebande et à l’économie souterraine ont détruit des petites et moyennes entreprises, ce qui a contribué à l’émergence d’un petit nombre de grandes entreprises contrôlant le marché et les prix.
Il a souligné que le seul moyen de redresser l’économie nationale et de la faire croître est de relancer les PME en les restructurant et en les ramenant à la production.
Où se trouve le ministère de l’Économie dans cette crise ?
Houas a confirmé que les statistiques officielles montrent qu’environ 38 000 entreprises sont déclarées en faillite chaque année entre 2017 et 2021, indiquant qu’une croissance à deux points pourrait être réalisée si le secteur était relancé.
Il a souligné qu’ils étaient en contact avec le ministère de l’économie et de la planification et qu’il avaient proposé des solutions à ce sujet. Cependant le ministère n’a pas d’autorité sur le système bancaire et sur les autres ministères, a considéré le représentant de l’association.
Il a souligné que le ministère de l’économie doit diriger les ministères et les banques vers la réalisation de ses objectifs, indiquant que le département travaille à élaborer un programme de sauvetage.
Et dans ce cadre l’association organisera un forum pour discuter du programme de sauvetage actuel qui ne sauve pas les entreprises mais sauve les prêts bancaires, a-il-ajouté, où on proposera un nouveau plan pour restructurer les entreprises en difficulté.
Il a également déclaré qu’il y a un certain nombre de lois liées aux questions économiques à l’Assemblée des représentants du peuple qui n’ont pas encore été examinées.
Nouvelles décisions de la Banque de financement des petites et moyennes entreprises
Dans ce contexte, la Banque de financement des petites et moyennes entreprises a décidé d’augmenter son capital de 10 millions de dinars à plus de 69 millions de dinars.
L’objectif de la décision est de restructurer financièrement la banque et de corriger son cours en réduisant les pertes, en préparation d’une nouvelle étape de développement.
Au début de l’année actuelle , la directrice générale de la Caisse de dépôt et de consignation(CDC) , Najia Gharbi, a annoncé le lancement d’une nouvelle ligne de financement pour les investissements dans les petites et moyennes entreprises en difficulté financière.
Elle précisé que cette ligne, financée par Le Fonds arabe pour le développement économique et social, financera 140 petites et moyennes entreprises dans le but d’améliorer les ressources financières et le capital de ces entreprises.