Tunisie : 39 journalistes devant la justice, 211 agressions à l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse

A l'occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse ce vendredi 3 mai 2024, la Tunisie célèbre dans un contexte particulier marqué par une situation exceptionnelle de la presse tunisienne, menacée dans sa liberté et même dans sa survie, face à une montée des menaces contre la liberté d'expression, la multiplication des procès contre les journalistes pour leurs activités journalistiques et l'augmentation des agressions et des pressions dont ils sont victimes.

Mohamed Ali ben ahmed - journaliste

À l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse ce vendredi 3 mai 2024, la Tunisie célèbre dans un contexte particulier marqué par une situation exceptionnelle de la presse tunisienne, menacée dans sa liberté et même dans sa survie, face à une montée des menaces contre la liberté d’expression, la multiplication des procès contre les journalistes pour leurs activités journalistiques et l’augmentation des agressions et des pressions dont ils sont victimes.

Dans le cadre de cette journée, la Tunisie occupe la 118ème place mondiale dans l’indice de liberté de la presse, après avoir progressé de trois points par rapport à l’année précédente où elle était classée 121ème, selon Reporters sans frontières.

39 journalistes devant la justice

Le syndicat national des journalistes tunisiens a révélé dans son rapport annuel sur les libertés de la presse en Tunisie pour la période allant du 3 mai 2023 au 3 mai 2024, que 39 journalistes ont été traduits en justice pour leur travail dans des affaires relevant de lois répressives telles que la loi anti-terroriste, la loi sur le blanchiment d’argent, la loi sur les communications, le code pénal et le décret 54.

Dans une situation sans précédent, les tribunaux tunisiens ont prononcé cette année 5 peines de prison contre des journalistes et des commentateurs, ces poursuites ayant été engagées en dehors du cadre du décret 115 réglementant la profession de journaliste.

Le rapport annuel du syndicat des journalistes a souligné que l’absence de l’autorité de régulation de la part du pouvoir politique en place a conduit à une augmentation du nombre de poursuites judiciaires.

Attaques contre les journalistes et répression systématique

Selon le rapport du syndicat, les journalistes, les correspondants et les photographes ont été victimes de 211 agressions au cours de cette période.

Malgré la tension ambiante, le pouvoir politique en place continue d’adopter une politique de fermeture envers les médias, notamment par la présidence de la République et l’Assemblée des représentants du peuple, en bloquant l’accès à l’information et en restreignant sa diffusion, laissant ainsi l’espace public soumis à un récit unique, celui du pouvoir, ce qui a eu un impact sur le débat public dans le pays et sur le droit des citoyens à l’information.

Cette politique s’est manifestée par l’interdiction pour les journalistes de couvrir les grands événements à plusieurs reprises, ainsi que par l’absence de programmes politiques dans les médias publics financés par les contribuables, privant ainsi les journalistes, ainsi que le public et les électeurs, de suivre et de comprendre la gestion des affaires de l’État et ses politiques publiques.

Toutes ces décisions vont certainement renforcer le désintérêt pour les affaires publiques et réduire la participation politique, selon le rapport.

Le rapport du syndicat des journalistes a souligné que la répression systématique et institutionnalisée des libertés constitue l’indicateur le plus important et le plus grave des crises que traverse le secteur de la presse et des médias.

Dans ce contexte, le syndicat a affirmé son engagement continu à défendre les droits des journalistes et les libertés fondamentales requises par l’exercice professionnel et libre de la profession, notamment un environnement public ouvert, des politiques médiatiques publiques, ainsi que des lois protégeant et garantissant les libertés.

marginalisation économique et sociale

Le syndicat des journalistes a souligné que les journalistes et leurs structures professionnelles sont désormais convaincus que l’objectif est clair : réprimer tout journaliste qui ose aborder des sujets sensibles qui préoccupent l’opinion publique, ou simplement critiquer un responsable de l’État et remettre en question la performance de certains ministres.

Dans le même contexte, il a mis en garde contre le danger que représente l’utilisation du pouvoir judiciaire pour cibler la liberté d’expression en Tunisie.

Dans un contexte similaire, le syndicat a considéré que la politique de marginalisation de la profession journalistique sur les plans institutionnel, économique et social se manifeste par la précarité de l’emploi dans le secteur (salaires bas, absence de couverture sociale, augmentation des cas de licenciement et de mise au chômage forcé des journalistes et non-paiement des salaires).

Dans ce contexte, le syndicat a conclu que le secteur de la presse et des médias a un besoin urgent et impératif d’une approche réformatrice urgente, globale, participative et ouverte à tous les acteurs, et que l’État assume la responsabilité de ne pas la mettre en œuvre et de retarder sa mise en œuvre, ce qui entraînerait des conséquences graves et dangereuses pour la vie politique et pour la société dans son ensemble.

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