La Tunisie a récemment enregistré une augmentation sans précédent de la masse des billets et pièces en circulation, atteignant 21,4 milliards de dinars en avril 2024 contre 19,4 milliards de dinars à la même période l’année précédente, selon les données publiées par la Banque Centrale de Tunisie (BCT).
Cette tendance à la hausse, observée depuis le second semestre de l’année passée, a franchi pour la première fois la barre des 20 milliards de dinars à la fin de juin.
Les Causes de l’Augmentation de la Masse Monétaire
Plusieurs facteurs ont contribué à cette augmentation spectaculaire. Parmi eux, le financement du budget de l’État par les banques sous forme de bons du Trésor et l’émission de monnaie sans contrepartie économique réelle. Les experts économiques critiquent cette situation, car une augmentation excessive de la masse monétaire peut entraîner une inflation galopante, une hausse des prix, une dépréciation du dinar et un déséquilibre général des finances nationales.
L’Importance de la Transition vers une Économie Numérique
Pour lutter contre la corruption et intégrer l’économie parallèle dans le circuit économique formel, plusieurs experts, dont un professeur d’économie à l’université tunisienne, estiment qu’il est crucial de réduire les transactions en espèces. L’adoption des cartes bancaires et des paiements numériques est devenue une tendance mondiale pour protéger l’économie nationale.
Les Résultats d’une Étude sur l’Économie Informelle
Une étude approfondie réalisée par le Programme des Nations Unies pour le Développement et l’Organisation Internationale du Travail a révélé que la part du secteur informel non agricole dans le PIB tunisien était de 28,5 % en 2020. L’augmentation des transactions en espèces pourrait également poser des risques économiques en exerçant une pression à la hausse sur les prix, dépréciant la monnaie nationale sur les marchés internationaux, rendant les importations plus coûteuses et affectant négativement la balance commerciale du pays. Cela pourrait également créer des déséquilibres macroéconomiques tels que des déficits budgétaires et commerciaux, compromettant la stabilité financière et la croissance économique à long terme.
Les Mesures pour Réduire les Transactions en Espèces
Ces dernières années, l’État a mis en place plusieurs mesures pour limiter les transactions en espèces, notamment en fixant un plafond de 5 000 dinars pour les transactions en espèces, comme stipulé dans la loi de finances de 2019. Cette démarche vise à réduire la liquidité en circulation et à réintégrer ces fonds dans le système bancaire.
Les Défis de l’Adoption des Comptes Bancaires
Cependant, la transition vers une économie sans espèces fait face à plusieurs défis. Le professeur d’économie Ridha Chkandali souligne que le faible nombre de Tunisiens possédant des comptes bancaires est dû au coût élevé de ces comptes, notamment en raison des taxes imposées. De plus, la méfiance des citoyens envers le système bancaire constitue un obstacle majeur. Il est donc essentiel de développer une infrastructure permettant aux Tunisiens d’accéder à des comptes bancaires à moindre coût pour encourager l’abandon des transactions en espèces.
Appel à la Digitalisation et au Renforcement de l’Inclusion Financière
Lors d’une session du comité des finances et du budget consacrée au projet de loi sur la lutte contre l’exclusion financière, le Conseil bancaire et financier a souligné la nécessité de développer les systèmes informatiques et les services financiers numériques en Tunisie. La digitalisation et la rationalisation des transactions en espèces sont cruciales pour renforcer l’inclusion financière et soutenir l’économie nationale.
En conclusion, la transition vers une économie sans espèces en Tunisie représente un défi majeur mais nécessaire pour lutter contre la corruption, intégrer l’économie parallèle et stabiliser l’économie du pays. Des mesures concertées et une sensibilisation accrue sont essentielles pour réussir cette transition.