Un an s’est écoulé depuis la mise en place de l’Assemblée des représentants du peuple depuis décembre 2022, suscitant de nombreuses interrogations sur le bilan parlementaire et son niveau de réponse aux demandes du peuple tunisien, en particulier sur les plans économique et social.”
Selon la nouvelle Constitution de 2022, le Parlement a été élu pour deux mandats après la révision de la loi électorale, qui a modifié le système de vote des listes partisanes et indépendantes au système de vote individuel.
Les pouvoirs retirés
le nouveau constitution tunisienne de 2022, élaboré et défini par le président de la République, a apporté des changements fondamentaux en transformant le système parlementaire en un système présidentiel. Les pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire ont été convertis en fonctions, reléguant le législatif au profit de l’exécutif. Le président est devenu le véritable et unique décideur politique, après avoir retiré plusieurs pouvoirs et rôles importants du Parlement pour les confier à la présidence de la République, qui contrôle désormais la scène politique et prend les décisions.
Après un an d’élection, le Parlement travaille avec des pouvoirs restreints et des compétences limitées, son travail législatif et de surveillance étant sous le feu des critiques. En effet, la constitution de 2022 accorde au président de la République la priorité en matière de proposition et de législation, tandis que les députés ont le droit de présenter des propositions de loi à condition qu’elles soient soutenues par 10 députés et ne compromettent pas l’équilibre financier du pays.
En outre, la constitution a retiré au Parlement le pouvoir de surveiller le gouvernement et de nommer son chef, confiant au seul président le pouvoir de nommer le gouvernement et de définir la politique générale de l’État, en informant le Parlement et le Conseil national des autorités locales (la deuxième chambre) de ses décisions.
La performance législative limitée
Depuis son élection, l’Assemblée des représentants du peuple a approuvé 37 projets de loi, dont 36 ont été adoptés, tandis qu’une seule loi, celle criminalisant la normalisation, a été rejetée, sa séance ayant été levée sans reprise à ce jour.
Il est notable que le Parlement n’a approuvé que des projets de loi émanant de la présidence de la République, à hauteur de 97 %, de manière quasi-automatique, durant une année entière, tandis que les projets de loi présentés par les commissions compétentes n’ont pas avancé et n’ont pas été soumis aux sessions plénières.
Selon un rapport de l’organisation Ana Yakef intitulé “Une année de concentration de l’Assemblée des représentants du peuple : une fonction législative sous l’emprise de la présidence”, le bilan des lois approuvées par le Parlement cette année est le plus faible par rapport aux deux législatures de 2014 et 2019, avec une baisse d’environ dix lois, la majorité des lois adoptées portant sur des sujets liés aux prêts et aux dons.
Dans le contexte du bilan parlementaire, le député et chef du bloc parlementaire national indépendant, Emad Oulad Jibril, a révélé que le gouvernement est responsable du blocage du travail parlementaire en ne présentant pas de projets de loi et d’initiatives législatives, ce qui a conduit au ralentissement de l’économie de l’État. Il a donc souligné la nécessité de diriger les critiques et les reproches vers le gouvernement et non vers le Parlement.
Oulad Jibril a estimé, dans une interview à Tunisie Tribune, que cela se manifeste par le fait que le gouvernement ne remplit pas pleinement son rôle. Il a déclaré : “Lorsque le gouvernement n’a pas présenté de projets de loi dans plusieurs domaines vitaux et importants, les députés ont proposé des initiatives législatives dans ce cadre, telles que le projet de loi sur l’amnistie des chèques sans provision et la responsabilité médicale. Cependant, le gouvernement s’y est opposé en affirmant qu’il avait des projets de loi à présenter à ce sujet, mais il ne les a pas soumis, ce qui a entravé le travail des députés et les propositions sont restées en suspens”.
Il est remarquable que la plupart des lois adoptées concernent des accords et des prêts, au nombre de 19, suivies de lois portant sur des amendements ou de nouvelles législations, au nombre de 11, et 6 lois sur les finances et le budget, ainsi qu’une seule loi sur l’octroi de privilèges d’exploitation de combustibles.
En revanche, les députés ont présenté 33 propositions de loi, soit 41 % de l’ensemble des projets de loi proposés, mais seule une proposition de loi, concernant la criminalisation de la normalisation, n’a pas été adoptée, selon le rapport de l’organisation.
Dans le même contexte, notre source a indiqué qu’il existe plusieurs projets de loi en cours de discussion au sein des commissions spécialisées, ce sont des initiatives législatives des députés qui seront présentées aux sessions plénières dans un avenir proche, comme la loi sur la responsabilité médicale qui a été approuvée, selon ses dires.
Dans son évaluation du bilan du Parlement actuel, l’analyste politique Mohamed Bouaud a estimé, dans une déclaration à Tunisie Tribune, que cette année n’a pas été celle des décisions, des projets de loi et des réformes parlementaires, qui auraient pu mettre en avant le pouvoir législatif, mais elle a été une année de rendez-vous électoraux successifs.
L’analyste politique a également souligné que le travail parlementaire s’est limité à l’approbation de certains accords de prêts de certains pays européens et fonds.
Relation conflictuelle ou complémentaire
Le démarrage des travaux du Conseil des régions et des provinces (la deuxième chambre parlementaire) dans l’élaboration de sa loi fondamentale et de son règlement intérieur a suscité de nombreuses questions sur la nature de la relation future entre les deux chambres parlementaires. S’agit-il d’une guerre de compétences entre elles ou, au contraire, leurs actions seront-elles complémentaires conformément à une loi régissant leur relation ?
En réponse à ces questions, le député Emad Oulad Jibril a déclaré à Tunisie Tribune que la relation entre l’Assemblée des représentants du peuple et le Conseil des régions et des provinces sera une relation de complémentarité, en attendant l’approbation de la loi régissant leur relation et les compétences de chaque conseil séparément. Le président de la République a confirmé que cette loi est en phase finale et sera bientôt présentée au Parlement pour approbation, selon ses dires.
Le vendredi 3 mai 2024, la session plénière inaugurale du Conseil national des régions et des provinces a débuté, dont les membres ont été élus au cours des derniers mois, à partir des résultats des élections locales, en passant par les conseils régionaux, jusqu’à l’adhésion à ce conseil.
Selon l’article 81 de la Constitution de 2022, le Conseil est composé de membres élus représentant les régions et les provinces. Les membres de chaque conseil régional élisent parmi eux 3 membres pour les représenter au Conseil national des régions et des provinces, et les membres des conseils régionaux de chaque province élisent un député parmi eux pour représenter cette province au Conseil. Il n’est pas permis de cumuler la qualité de membre du conseil et celle de député ou toute autre fonction ou activité.